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  • Conseil et accompagnement en développement stratégique, professionnel et personnel, particulier et organisation, individuel et collectif. Enseignant et formateur de l'adolescent à l'adulte pour tout ce qui touche de prés ou de loin au commerce.
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12 mai 2011

Le syndrome de la Reine Rouge

N’entendons-nous pas de plus en plus de personnes, sensées et intelligentes, dire : « je me sens dépassé par les événements, la conjoncture, les circonstances, les émotions, les changements, les gens, etc. » ? Si bien sûr.

Certes l’époque est moins « stable » que pendant les trente glorieuses, la croissance pour les pays dits occidentaux, n’est plus ce qu’elle était, les perspectives d’avenir (donc de projets/rêves) semblent se réduire. Mais que cache cette plainte/crainte/désespérance ?

Ne faut-il pas y voir une simple évidence qui plus est naturelle : chaque forme de vie sur cette terre, comme le cycle de vie d’un produit, commence par se développer puis atteint sa maturité avant de décliner. Pourquoi sommes nous incapable d’accepter cette vérité ? Elle nous dit qu’à chaque moment de notre « cycle » nous connaitrons les affres du doute et de la remise en cause conditionnés par le besoin humain (Maslow toujours lui) de s’élever, suivant en cela le dicton (on y prête crédit ou pas) : « qui n’avance pas recule ».

Se sentir dépassé est donc inéluctable. Mais en souffrir est une autre histoire. Autant nous l’acceptons presque sereinement quand il s’agit du physique (Bolt coura toujours plus vite que nous, Nadal nous mettra 6/0 sans problème) autant il devient impossible à gérer dans les sphères affectives/émotionnelles, intellectuelles/culturelles (même Einstein a trouvé plus fort que lui ).  Dans tous les domaines, l’élève dépassera le maitre. Ce sentiment de faire du sur-place, de toujours courir sans franchir une ligne d’arrivée fictive, de ne pas atteindre un résultat, de croire que les autres font mieux et plus vite, de ne rien comprendre, de ne pas savoir faire, sans parler de subir l’injustice, la lâcheté et la malveillance humaines (dictées par nos peurs) a le don de nous déprimer, voir plus.

J’entends bien la douleur systémique du physique au psychique et inversement. Même si tout cela est induit par notre histoire (inné/acquis, croyance/religion) qui nous façonne par ses valeurs schizophréniques/culpabilisantes du bien et du mal, d’enfer et de paradis, de compétition, du progrès incessant et de la réussite comme Graal, il semblerait que nous puissions nous éviter certains désagréments pour améliorer notre bien-être.

D’abord posons nous les questions :

  • nous connaissons nous suffisamment pour bien évaluer nos limites et ainsi pouvoir  apprécier ce qui est en notre pouvoir ou pas, de régler nos difficultés avec ou sans facilité ?
  • savons-nous nous fixer des objectifs cohérents avec nos capacités, hiérarchiser les priorités, ne pas sauter les étapes, choisir de se faire aider et éliminer ce qui n’est pas atteignable (S’il n’y a pas de solution c’est qu’il n’y a pas de problème) ?
  • pouvons-nous relativiser notre besoin de reconnaissance, d’indentification, de différenciation, d’intégration pour diminuer la pression que nous savons nous mettre tout seul en ayant un égo mal adapté ?
  • sommes-nous assez conscient du mal que l’on se fait en se lançant des défis irréalisables pour faire ses preuves, poussés par la recherche de la perfection, donc par la crainte de perdre, de la culpabilisation en cas d’échec (alors qu’on apprend plus de ses erreurs que de ses victoires), du ridicule/ de la honte, et qui n’aboutit qu’à la perte de confiance (en soi, puis en les autres) ?

Enfin, essayons de trouver des chemins de progrès pour minimiser le mal-être induit par l’impression de se sentir dépassé. Car il s’agit bien de cela : un sentiment, une subjectivité, une illusion de vouloir tout contrôler, de se sentir fort/responsable, inattaquable, de ne pas passer « au travers » de notre vie. Car le problème est bien celui-ci : notre interrogation perpétuelle sur ce qu’il y après la vie nous gâche notre existence en nous forçant, plus ou moins suivant les personnes, à vouloir accomplir le maximum de (bonnes ou mauvaises) choses lors de notre passage sur terre. Hors celle-ci n’étant pas un paradis (croyance théologique), nous ne pourrons pas éviter les inégalités, les contrariétés, les mauvaises surprises/nouvelles. Devant l’utopie de cette obsession nous nous sentons immanquablement dépassés. Donc, plutôt que de lutter (fatigue, nervosité, incommunicabilité, agressivité, désociabilisation, déviance, anomie,  trouble, stress, dépression, maladie, mort) pour atteindre l’inaccessible étoile (comme disait J BREL), travaillons déjà à être plus tolérant avec nous même.

Voici quelques idées collatérales qui peuvent nous conduire à plus de paix (avec nous-mêmes) :

  • sachons lâcher prise en acceptant de ne pas être omnipotent (toute puissance : sournoiserie des religions monothéistes) : autorisons-nous à être incompétents parfois.
  • N’hésitons pas à nous gratifier/féliciter/récompenser chaque fois que nous réussissons une avancée même minime.
  • Apprenons à maitriser/temporaliser les événements qui nous submergent, vivons plus dans le concret/le quotidien, réduisons notre zone d’incertitude (gérons nous nous même avant de gérer les autres) en anticipant/prévoyant moins. Cela s’appelle : « vivre le présent ».
  • Acceptons de nous laisser dépasser (au lieu de regarder dans le rétroviseur, nous aurons l’objectif devant nous). L’estime comme la réalisation de soi ne doivent pas être basées uniquement  sur la comparaison permanente.
  • Décidons (= faire des choix) et agissons : ne passons pas plus de temps à réfléchir sur la potentialité de réussite ou d’échec de notre tentative que sur sa concrétisation : « Seuls ceux qui ne font rien ne se trompent pas ». En agissant nous avançons, certes peut-être comme le marin face au vent qui tire des bords carrés, en ayant l’impression que d’autres vont plus vite, mais est-ce bien là le plus important (la fable : le lièvre et la tortue) ? Qui a dit : ce qui compte, c’est le premier pas sur la route pas sa fin ? (et la vitesse, c’est dépassé. Non ?).
  • Last but not least : n’abandonnons jamais car « tout ce qui nous tue pas nous rend plus fort » (relisait « Humain trop humain » de mon auteur préféré Nietzche, vous m’en direz des nouvelles).

En mettant en place ces quelques principes, bien modestes, nous aurons moins d’occasion de nous sentir dépassés. Bénéfice immédiat et gratuit : vous ne subirez pas le « syndrome de la Reine Rouge1 (Leigh Van Valen)».

Bonne chance.

1 - La théorie de la Reine Rouge part de la constatation que la probabilité d'extinction d'un groupe d'êtres vivants est constant au cours des temps géologiques. Elle se base sur les courbes de (sur)vie, établies par Van Valen, d'une cinquantaine de groupes d'organismes vivants tels que des protistes, des plantes et des animaux. Il tire son nom d'un épisode fameux du livre de Lewis Carroll : De l'autre côté du miroir (deuxième volet d'Alice au pays des merveilles) au cours duquel le personnage principal et la Reine Rouge se lancent dans une course effrénée. Alice demande alors : « Mais, Reine Rouge, c'est étrange, nous courons vite et le paysage autour de nous ne change pas ? » Et la reine répondit : « Nous courons pour rester à la même place. ».

Le syndrome/paradoxe de la Reine Rouge illustre les troubles neurologiques sous-jacents auquel sont confrontées les personnes, et la manière dont les prises de décision et l’agilité mentale s’en trouvent affectées. Lorsque quelqu’un travaille d’arrache-pied, au point de se sentir submergé, mais continue cependant à se sentir dépassé par les événements, son cerveau est de plus en plus inondé par une hormone appelée cortisol. Sécrété par le cortex surrénal, le cortisol améliore les fonctions cognitives pendant les périodes de stress à court terme. Le stress aigu provoque une augmentation de l’afflux de sang, d’oxygène et de glucose vers les muscles et le cerveau, ce qui a pour effet d’améliorer notre mémoire et notre capacité à résoudre les problèmes.  Si l’effet est bénéfique à court terme (c’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous avons pu venir à bout de cette année difficile), en revanche, l’exposition prolongée des neurones au cortisol réduit leur capacité à absorber le glucose (qui constitue leur unique source d’énergie) et les fait rétrécir.  Il s’ensuit une destruction progressive des neurones du cerveau.

Le cortisol et la prise de décision

La principale zone affectée est celle du  cortex préfrontal. Le cortex préfrontal est la partie du cerveau responsable de l’agilité mentale, de la prise de décision et de la résolution de problèmes difficiles (elle est située dans la partie avant du cerveau, au-dessus des yeux, derrière le front). C’est également la partie du cerveau qui a tendance à décliner le plus avec l’âge. La flexibilité mentale (capacité à penser à deux choses en même temps en passant rapidement de l’une à l’autre, ou à changer de modèle cognitif à mi-parcours, ou à reconsidérer des choses anciennes d’une manière nouvelle) est diminuée par l’exposition chronique au cortisol. L’impact sur la prise de décision est très important. Une étude réalisée en Australie, dans la Nouvelle Galles du Sud, a démontré que 73% des chirurgiens stagiaires travaillant dans un environnement complexe et incertain souffraient de dépressions, d’anxiété ou d’autres troubles cliniques. Ils étaient submergés de travail, et leur cerveau était continuellement inondé de cortisol. De surcroît, 20% des internes souffraient de dépression clinique. Ces personnes commettaient six fois plus d’erreurs de prescription que les autres. 

Que faire?

Contre le cortisol, les principaux facteurs de protection sont avant tout le bien-être social, physique et psychologique.  Les individus à l’aise aussi bien sur le plan social que physique et psychologique présentent des taux de réactivité au cortisol nettement moins élevés à la suite d’une tâche stressante. Nous venons d’achever une étude réalisée sur cinq ans, portant sur des dirigeants ayant atteint un haut niveau de réussite tout en conservant leur bien-être ; il en est ressorti qu’aucun de ces dirigeants n’était né avec des pouvoirs ou des capacités hors-du-commun : ils les avaient acquis. Ces facultés leur permettaient de gérer leur taux de cortisol de manière beaucoup plus efficace ; leurs prises de décision s’en trouvaient améliorée, et ils étaient en mesure d’aborder les problèmes au lieu de les éviter. Cela nous convainc que les organisations qui prospéreront le plus au cours des mois qui viennent seront celles qui s’efforcent de donner aux dirigeants les compétences leur permettant de se gérer eux-mêmes au lieu de gérer les autres. Cela peut sembler contre-intuitif, mais en réalité cela tombe sous le sens si l’on considère l’environnement dont nous sommes issus d’une part, et la manière dont le cortisol affecte le cerveau d’autre part. Comme disait Peter Drucker à la fin de sa carrière: "Je ne crois plus qu’il soit essentiel pour les cadres d’apprendre à gérer d’autres personnes, notamment leurs subordonnés. Maintenant, je leur apprends avant tout à se gérer eux-mêmes.”

 

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